Waël Ali et Simon Dubois

Artiste & chercheur

  • Waël Ali +

    Écrivain et metteur en scène syrien, Waël Ali est né en 1979. En 2004, il obtient son diplôme de l’Institut supérieur des arts de la scène de Damas. Il poursuit ses études en France, à Lyon, où obtient un Master II d’Arts du spectacle à l’Université Lumière Lyon. Entre 2003 et 2006, Waël Ali travaille comme dramaturge dans plusieurs projets, notamment dans le cadre d’un projet de théâtre interactif en Syrie où il codirige des formations dans diverses provinces syriennes.
    En 2014, il écrit et met en scène le spectacle Je ne m’en souviens plus, présenté au Théâtre
    Tournesol de Beyrouth au Liban puis dans plusieurs lieux et festivals, dont le Théâtre Gorki à
    Berlin, à la Maison d’Europe et d’Orient puis à Confluences à Paris, au Toneelhuis d’Anvers
    en Belgique et à Tunis, dans le cadre des Journées théâtrales de Carthage. Le texte de Je m’en souviens plus a été traduit en néerlandais et publié aux éditions Bebuquin/Moussem.
    Depuis 2016 Waël Ali démarre une collaboration avec l’artiste de théâtre Chrystèle Khodr pour la conception, l’écriture et la direction du projet Titre provisoire. Depuis sa première en 2017 le spectacle a été présenté dans divers théâtres et festivals en Europe. Son nouveau spectacle Sous un ciel bas est actuellement en tournée européenne.

  • Simon Dubois +

     

     

    Après avoir soutenu en 2019 une thèse sur l’exil d’une jeune génération du théâtre syrien contemporain après le printemps syrien, Simon Dubois a intégré l’équipe de l’ERC DREAM. Il a coécrit L’esprit de la révolte, sous la direction de Leyla Dakhli paru en 2020 aux éditions du Seuil. Désormais chercheur à l’Institut français du Proche-Orient à Amman, il continue d’interroger une histoire sensible de la Syrie en essayant de proposer un regard original sur l’histoire d’un quotidien occulté voire parfois oublié sous la dictature.

Du salon à l’imprimante, déplacements et contre-champs militants à une Syrie de plomb.

Ce projet s’appuie sur la collecte en cours d’une histoire orale auprès de militants de partis clandestins syriens des années 80, désormais réfugiés en Europe. Sous la direction de Leyla Dakhli, historienne du temps présent, l’ambition est de donner à voir, à entendre, une part occultée de la vie sociale dans une Syrie de plomb. Ce n’est pas tant l’histoire d’un parti ou des idées qui forme le socle commun de cette recherche, mais bien les gestes d’un quotidien marqué par la clandestinité, l’amour en temps de tracts, l’odeur de l’encre dans la planque de l’imprimerie, l’écoute discrète des grands frères dans le salon privé (espace typique des
maisons syriennes à différencier du salon public, où l’on s’assoit par terre avec les amis les plus proches autour d’un poêle), les mises en scène en taule, la formation littéraire et linguistique derrière les barreaux.

Ces militants ont pour point commun d’avoir participé à une expérience théâtrale en prison. De 1987 à 1995, ils ont constitué une troupe de théâtre qui a monté sept pièces. Certaines sont des classiques comme l'adaptation du Procès de Kafka, une relecture de La Mouette de Tchekhov ; d’autres ont été écrites en prison sur des paquets de cigarettes. La Maison qui a été construite par Swift de l’auteur russe Grigori Gorine a été mise en scène dans un contexte très particulier : celui de la chute de l’Union soviétique. En invitant le docteur Swift et son monde imaginaire sur les planches de la prison, ces militants communistes ont lancé un débat de fond sur cet évènement politique majeur à la fois pour leurs convictions politiques, mais également pour l’avenir de leur pays et du monde. Cette réflexion a ainsi été ouverte par une œuvre de fiction, satirique et particulièrement complexe sur le plan dramaturgique. Waël veut recréer cet espace à la fois théâtral et social lié à la lecture d’un moment historique décisif, du point de vue de la taule. Mais ce projet ne se limite pas aux acteurs-prisonniers. Il s’étend également au public incarcéré qui a fait ce spectacle en le recevant et dont nous retrouvons la trace au fil des entretiens.